Chaque année, 520 000 vols ont lieu sur les chantiers. Ceux-ci concernent tant le petit matériel (câbles, outils, matériaux), le carburant que les engins, petits et gros. Des méthodes et des technologies existent pour limiter les vols. Tour d'horizon.
Partie 1
État des lieux
Partie 2
Les bonnes pratiques
Partie 3
Les équipements de sécurité
Partie 4
Nouvelle technologie
Partie 5
En savoir plus
Le vol sur les chantiers coûte au secteur du BTP plus d'un milliard d'euros par an, soit au minimum 1 % du chiffre d'affaire de la branche. La FFB a mené une enquête en 2007 qui révélait qu'au moins une entreprise sur deux avait subi un vol représentant plus de 10 000 euros au cours des dix mois précédents. Dans 56 % des cas, il s'agissait d'un vol simple, 43 % de vol avec effraction et 1 % de vol avec violence ou séquestration. « La grande majorité des vols constatés (environ les deux tiers) relève du vol d’opportunité, par une population considérant normal de se « servir » sur un chantier, précise la FFB. » En outre, 90 % des entreprises interrogées avaient déposé plainte sans aucun résultat. Cette enquête a été le point de départ d'une campagne contre le vol de la fédération, baptisée « Ras-le-Vol ». Elle a suscité la signature d'un protocole avec le ministère de l'Intérieur en avril 2008, renouvelé en janvier 2013, visant à améliorer la lutte contre ce fléau. Dans chaque département, un référent sûreté de la police ou gendarmerie est nommé pour informer, conseiller et sensibiliser entreprises et maîtres d'ouvrage avant l'ouverture d'un chantier. Pour chaque chantier sensible, ces derniers sont invités à remplir une fiche permettant au référent d'évaluer les risques et les systèmes préventifs mis en place.
« Dans les zones sensibles, il est maintenant entré dans les mœurs de se préoccuper de la sûreté en amont du chantier, assure François Asselin, vice-président de la FFB. Quand tous les responsables de l'acte de construire se mettent autour de la table, ça permet de trouver des solutions pragmatiques et peu coûteuses. » Il existe d'abord un certain nombre d'action de bon sens à engager sur un chantier consistant à décourager le vol, à le rendre plus difficile et plus long à commettre. Il s'agit ainsi de clôturer le chantier et d'y apposer un affichage dissuasif (« chantier interdit », « surveillé », etc.). Les outils et matériaux sont évidemment à ranger et mettre dans des espaces sécurisés. Il faut de même éviter d'approvisionner un chantier en matériaux à la veille d'un week-end. Pour ce qui est des engins, il faut les positionner de façon à rendre leur enlèvement difficile, en les imbriquant par exemple les uns dans les autres. Autant que possible ils doivent être marqué et identifié de façon à rendre leur recel plus compliqué.
« Le gardiennage reste le moyen le plus dissuasif, estime François Asselin, mais je suis persuadé que la technologie va nous apporter beaucoup. » Car à la traditionnelle surveillance humaine, s'ajoute une pallette croissante d'équipements de sécurité. « Avant les maîtres d'ouvrage avaient le réflexe de la sécurisation humaine mais vu les coûts, ils se tournent de plus en plus vers la sécurisation électronique, indique Guénaelle Lechat, de l'entreprise de services de télésurveillance Excelium. Nous considérons le BTP comme un marché porteur. » L'installation de caméras de vidéosurveillance sur le chantier ne nécessite pas d'autorisation, si elles ne visionnent pas la voie publique et respectent la vie privée.
Pour les produits plus sophistiqués, le marché est en revanche embryonnaire. « Certes, la demande a augmenté ces dernières années, mais les commandes pour les chantiers ne représentent même pas 1 % de notre clientèle, constate Jésus Jimenez, de Prodatec, fabricant de barrières à infrarouges et à hyperfréquences. Nous avons des solutions, mais nous ne sommes pas assez consultés par les responsables de chantiers. » Selon lui, les barrières hyperfréquences ne sont pas indiquées pour un chantier, mais plutôt les câbles sensibles pour clôture et les barrières infrarouges. « Pour le câble, il faut une clôture rigide sinon ça ne fonctionne pas. Quant aux infrarouges, il faut un minimum d'organisation : nommer un responsable du système, avoir un chantier propre pour qu'aucun emballage ne vole, ne pas décharger le matériel n'importe où, etc. »
Une nouvelle technologie a toutes les chances de s'imposer dans les mois à venir : les puces RFID (badges électroniques communicants). En effet, une convention établie entre la FFB, le ministère de l'Intérieur et Fil RFID* a permis de définir un cahier des charges pour la fabrication de systèmes RFID adaptés aux chantiers. C'est désormais chose faite, grâce à deux fabricants français : Servtel et KBS (gamme Bativigil). « Nos tests ont révélé que les barrières infrarouges généraient 98 % de fausses alertes, assure Jean-Philippe Verger, vice-président de Fil RFID, car l'alarme est déclenchée dès que quelque chose coupe le faisceau lumineux : une feuille, un animal, etc. Avec les systèmes de détection RFID, chaque alerte était provoquée par quelqu'un ayant touché l'objet. C'est intéressant pour les forces de l'ordre qui ne se déplacent pas pour rien. En ce moment, les entreprises du bâtiment se font piller. Une solution RFID coûte entre 5 000 et 6 000 euros, mais elle est très rapidement amortie. En outre, le dispositif permet d'obtenir une assurance « vol pur » auprès de SMABTP, alors qu'il n'y avait pas d'assurance jusqu'ici. Aujourd'hui seuls deux fabricants existent au monde et ils sont français. Les produits de Servtel sont d'ores et déjà disponibles, et ceux de KBS le seront d'ici deux mois. Nous tablons sur 1 000 à 5 000 pièces vendues par an pour la France seule. »
* Fil RFID : fédération francophone des industriels et acteurs de la RFID
Vincent Boulanger