Les réseaux de chaleur jouent un rôle indispensable dans le développement des énergies renouvelables et de récupération en France.
Partie 1
Réseaux de chaleur, le choix de l’efficacité énergétique
Partie 2
Un système de distribution de chaleur produite de manière centralisée
Partie 3
Solliciter divers sources renouvelables
Partie 4
Coût initial important, dépenses de fonctionnement faibles
Notre facture énergétique dépasse 60 milliards d’euros chaque année. Engagée dans la lutte contre le réchauffement climatique, la France développe sur son territoire des réseaux de chaleur dans le but de moins recourir aux énergies fossiles et améliorer son efficacité énergétique. Le Syndicat National du Chauffage urbain a récemment recensé 432 réseaux de chaleur. Répartis sur 350 villes et s’étendant sur 3 300 kilomètres, ils distribuent entre 5 et 6% de la chaleur consommée dans le résidentiel. Cela représente 2,1 millions d’équivalents-logements desservis et près de 25 000 GWh d’énergie par an. Or, s’il souhaite contribuer aux objectifs du Grenelle de l’Environnement, notre pays doit multiplier le nombre de raccordement aux réseaux de chaleur par trois d’ici 2020. La part des énergies renouvelables devra être portée à 75 % dans les sources d’approvisionnement. « Les réseaux de chaleur participent à cet effort environnemental, parce qu’ils centralisent nos besoins en chaleur, argumente Emmanuel Aldeguer, président de Power Solutions. Nous traitons mieux nos besoins, nous mutualisons nos coûts d’investissement et nous accédons à des gisements d’énergie difficilement exploitables par des systèmes individuels. » Voilà pourquoi le marché français des réseaux de chaleur est en pleine expansion. Depuis 2009, la France densifie ses réseaux existants, établit de nouveaux réseaux et remplace les chaudières à énergies fossiles par des chaudières utilisant des énergies renouvelables. « La France encourage la mixité énergétique, explique Nicolas Dayat, chargé d’affaire chez Thermaflex France. Nous avons intérêt à exploiter plusieurs sources énergétiques, surtout celles que nous possédons localement. » Les réseaux de chaleur participent au développement des villes intelligentes parce qu’ils déconnectent l’apport énergétique de la source, et qu’ils permettent la combinaison de plusieurs ressources.
Les réseaux de chaleur produisent et distribuent de la chaleur pour le chauffage et l’eau chaude sanitaire de plusieurs utilisateurs. Comment ça marche ? L’énergie calorifique est d’abord produite dans une ou plusieurs unités de production. « Ces unités garantissent la température de l’eau, ou la pression de la vapeur, dans les canalisations », précise Nicolas Dayat. L’énergie est ensuite transportée par un fluide caloporteur jusqu’à des sous-stations d’échange. Elles sont situées en pied d’immeuble et permettent le transfert de la chaleur entre le réseau primaire et le réseau secondaire par le biais d’un échangeur. Les fournisseurs de tubes préisolés sont les seuls professionnels compétents pour réaliser le dimensionnement du réseau. « Le maître d’œuvre propose un plan, le fournisseur l’adapte en prenant en compte la dilatation du réseau. Cela suppose de faire des calculs très complexes, indique ainsi Emmanuel Aldeguer. Car un réseau de chaleur fonctionne en circuit fermé. Le fluide chaud produit est transporté, puis ramené jusqu’à l’unité de production lorsqu’il est délesté de ses calories.
Les réseaux de chaleur constituent le seul moyen de mobiliser massivement de nombreuses sources d’énergies renouvelables. D’abord, la chaleur peut être produite avec du bois. Un réseau de chaleur biomasse fonctionne grâce à une chaudière principale, alimentée par différents types de bois (plaquettes forestières, écorces, granulés, bois de recyclage etc.), et avec au moins une autre chaudière secondaire assurant l’appoint et la réserve en cas de rupture d’approvisionnement. En 2010, les réseaux de chaleur biomasse ont fourni l’équivalent de 300 ktep de chaleur, mobilisant près de 1,5 million de tonnes de bois par an. L’objectif national est d’atteindre, en 2020, les 1 200 ktep, ce qui signifie de parvenir à produire quatre fois plus de bois énergie. Deuxième ressource renouvelable que la France utilise pour produire de la chaleur : la géothermie. Elle exploite des aquifères dont les températures oscillent entre 55 et 90°C. Ils se trouvent dans des bassins sédimentaires, à des profondeurs de 300 à 1 700 m. L’eau pompée cède sa chaleur au réseau grâce à un échangeur thermique. La géothermie est une énergie minoritaire sur l’ensemble des réseaux de chaleur français : 65 réseaux de chaleur géothermiques chauffent actuellement 200 000 logements. L’objectif national est d’atteindre les 650 000 logements chauffés en 2020. Enfin, la troisième énergie, largement utilisée en France, n’est autre que la chaleur issue des usines d’incinération d’ordures ménagères. Raccordée à un réseau de chaleur, une usine d’incinération d’ordures ménagères peut chauffer un foyer à partir des déchets de sept autres. Peuvent également être raccordés des sites industriels ainsi que des centrales électriques. Cette chaleur est récupérée et transférée au réseau, sur place, via un échangeur thermique. Aujourd’hui, 1/5 de la chaleur des réseaux français provient des déchets.
Malgré des dépenses de fonctionnement plus faibles dans la durée que les systèmes de chauffage individuels, les réseaux représentent un investissement important pour les maîtres d’ouvrage. Aussi, ces derniers doivent savoir intégrer leurs projets dans une vision à long terme et rechercher la solution la plus adaptée. À travers son étude annuelle, l’association AMORCE démontre que les réseaux sont une solution de chauffage compétitive, même si leur amortissement ne sera effectué que sur 20 à 30 ans. Pour les encourager à opter pour un réseau de chaleur, des aides publiques sont accessibles. Le Fonds Chaleur, par exemple, a contribué à la réalisation de 45 projets de réseaux de chaleur en 2009, date de sa création. Actuellement doté de 240 millions d’euros par an, il est destiné à l’habitat collectif, aux collectivités et à toutes les entreprises. Ce soutien est toutefois conditionné au fait que les besoins de chaleur du réseau soient assurés par des énergies renouvelables et de récupération à hauteur de 50% minimum. « Des conseils régionaux et généraux apportent aussi un soutien financier à la réalisation de réseaux de chaleur, dans le cadre de leurs politiques locales de soutien aux énergies renouvelables », rappelle Nicolas Dayat. Ces aides publiques sont aujourd’hui indispensables au développement des réseaux de chaleur en France. Début 2014, le Ministère de l’Écologie, conscient de cette situation, a indiqué sa volonté de renforcer le Fonds Chaleur pour la période 2015-2017.
Charlotte Malbranque