Loueurs ou fabricants, les spécialistes du blindage sont peu nombreux en France et ont dû varier leur demande pour gagner des parts sur un marché de niche.
Partie 1
L'évolution des équipements
Partie 2
Le blindage entré dans les moeurs
Partie 3
Une capacité d’innovation pour une approche différente
Partie 4
La location indispensable sur les gros chantiers
Partie 5
L’impact de la crise sur le marché
Ces équipements ont beaucoup évolué, tout comme l’offre. Parfois manu-portable, ces éléments font bien souvent plusieurs tonnes et servent à de gros chantiers de travaux publics. Ils y ont toute leur place pour assurer la sécurité du personnel oeuvrant au fond de celles-ci. « La sécurité est une qualité intrinsèque du blindage en France », explique Jean-Christophe Fouquet, responsable de la société Krings International France. L’entreprise a fait de la location du matériel de blindage sa spécialité, notamment sur les blindages acier. « Sur nos parcs, nous avons toutes les gammes, y compris les glissières d’angle. Nous travaillons sur différentes profondeurs. Nous sommes capables de blinder de 1,30 m à 8,50 m de profondeur », poursuit-il. Le tonnage utilisé chaque année n’est pas comptabilisé. Il préfère parler en termes de mètres carrés. Ce chiffre se porte à 35 000 m². La location n’a jamais aussi bien fonctionné qu’en temps de crise.
Le blindage est désormais entré dans les mœurs sur le territoire français, même s’il reste encore quelques efforts à faire d’après Marc Cayron, gérant de l’entreprise PCA. « C’est un investissement lourd, mais il faut que les entreprises arrivent à admettre que le blindage fait partie de l’équipement d’intervention », assure-t-il. Sa société fabrique un matériel « passe-partout ». Une véritable niche au vu de ce qui existe sur d’autres chantiers. Créé en 1985, PCA s’est spécialisé dans la construction de blindage ultra-léger et manu-portable. La production de ce type de matériel a débuté spécialement pour la SADE, une filiale de Veolia. Rapidement, ce blindage a séduit les distributeurs d’eau et des entreprises de travaux publics. L’entreprise continue de respecter une vision et une seule, celle du respect de la demande de ses clients. « Le cahier des charges est toujours respecté. Il fallait du matériel à demeure pour les véhicules, sans que cela crée un problème de surcharge du véhicule », indique-t-il. Second point, les clients de PCA réclamaient un matériel ne nécessitant aucun entretien. Des matériaux de l’aéronautique ont donc été utilisés pour parvenir au résultat final, des panneaux sandwiches composés de deux taules en aluminium à l’extérieur et avec uns structure nid d’abeille au milieu. « Nous avons prix des composants sérieux. Pour un blindage de 1,50 m par 0,50 m, le poids est de 11 kg. Il peut être mis manuellement dans la tranchée », souligne-t-il. Cependant, cette opération peut également être réalisée par des méthodes de levage pour les panneaux les plus lourds.
Cette volonté de créer du matériel innovant a poussé l’entreprise à réduire son champ d’utilisation. Pas de location chez PCA, ni de revente. Uniquement de la vente directe. La qualité du matériel nécessite de réaliser les demandes précises de chaque client, bien souvent des canalisateurs, des services municipaux des eaux, des entreprises de travaux publics ou encore des gestionnaires de réseaux d’eau, tels la Saur ou la Lyonnaise des Eaux. Cette capacité d’innovation demande à l’entreprise une approche différente avec des démonstrations pour séduire de nouveaux clients et fidéliser les plus anciens. Marc Cayron ne croit d’ailleurs clairement pas dans la location. « C’est un leurre. C’est le métier des entreprises de travaux publics d’avoir du blindage », précise-t-il. Pour cette raison, il milite pour que son blindage soit disponible dans chacune des voitures d’intervention.
La vision de Krings est totalement différente puisque l’entreprise s’attaque à de gros chantiers. La location est une nécessité puisqu’elle représente 70 % du chiffre d’affaire de l’entreprise. « Nos clients ne veulent pas consacrer du budget et de l’investissement à du matériel tel que le blindage », affirme-t-il. Les panneaux de blindage proviennent de fabricants allemands, mais là encore, la sécurité est la première approche de Jean-Christophe Fouquet. « Nous avons toutes les normes européennes. Blindeur, c’est un métier à part entière. Nous nous devons de livrer du matériel qui va avant tout assurer la sécurité », assure-t-il. Et en temps de crise, les clients recherchent également de la réactivité. Pour cette raison, Krings a installé des dépôts tout le long de l’axe Paris-Marseille. L’autre nécessité pour le loueur est de varier ses clients. Les entreprises de BTP, de réseaux secs ou les canalisateurs ne sont plus les seuls à rechercher le blindage. Dans certains cas, Jean-Christophe Fouquet s’adresse directement aux entreprises de génie civil voire aux bureaux d’étude, chargés de budgétiser le futur blindage utilisé. A cela s’est greffé une autre évolution du métier. « Nous travaillons avec tout ce qui est ouvrage enterré alors que ce n’est pas du tout l’usage premier du blindage », explique-t-il. Certaines piles de pont sont parfois réalisées grâce aux blindeurs, tout comme des galeries techniques pour de nouvelles lignes de tramways.
L’arrivée de la crise a toutefois eu un réel impact sur le marché, surtout depuis 2012. Beaucoup de collectivités étant aujourd’hui prises à la gorge, elles ont repoussé de nombreux chantiers de travaux publics, dans lesquels les entreprises de blindage avaient leur mot à dire car elles arrivaient en sous-traitance. « Nous avons de gros projets, mais malheureusement, les tiroirs sont vides et les financements pas encore là », estime le patron de Krings. Comme chez PCA, l’avenir n’est pas si terne. Bien au contraire, de futurs chantiers comme l’induction d’eau potable et, surtout, le renouvellement des réseaux d’assainissement devraient permettre à ces spécialistes de voir le marché repartir. « Nous avons un taux de renouvellement du parc d’assainissement d’environ deux à trois pour cent alors qu’il devrait être deux à trois fois plus élevé », s’étonne-t-il. Quant aux fabricants comme PCA, il leur faut séduire leurs clients en allant en permanence plus loin dans la recherche et développement, en assurant un maximum la sécurité des ouvriers sur les chantiers. La notion, bien que secondaire, est toujours d’actualité pour les maîtres d’œuvre.
Mathieu Liénard