Grâce aux nouvelles technologies de l’information, les fournisseurs d’électricité, de gaz et d’eau connaîtront bientôt en temps réel les besoins des consommateurs. Plus de données, pour une meilleure gestion du réseau et une baisse du gaspillage de l’énergie.
Partie 1
La naissance d’un « Internet de l’énergie »
Partie 2
Gazpar, le compteur de gaz intelligent imaginé par GrDF
Partie 3
iPERL, le compteur d’eau conçu par SENSUS
Partie 4
ErDF développe le réseau électrique de demain
« Les réseaux intelligents vont transformer les habitudes des consommateurs dans les années à venir », prédisait Philippe de Ladoucette, président de la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE), en 2010. En associant les technologies de l’information et de l’énergie, fournisseurs et industriels ont l’ambition d’améliorer la gestion des réseaux. « En France, nous devons mieux gérer l’énergie produite, soutient la responsable Programme Réseaux Électriques Intelligents au sein de l’ADEME, Marie-Pierre Hoffmann. L’agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie finance des projets de réseaux intelligents dans le cadre des Investissements d’Avenir. « En concevant les infrastructures et logiciels adaptés, les gestionnaires accèdent aux informations dont ils ont besoin pour équilibrer la production et la consommation. » En France, les recherches dans ce domaine sont particulièrement avancées. Des expérimentations sont déjà en cours. Les compteurs Gazpar, iPERL et Linky sont déjà, ou vont prochainement être, déployés sur le territoire français, tandis que les acteurs de l’électricité développent des projets de réseaux électriques intelligents, appelés « smart grids ». « Les résultats des expérimentations sont attendus prochainement, annonce Marie-Pierre Hoffmann. La CRE suit ces tests avec attention afin d’effectuer toutes les évolutions réglementaires nécessaires. En marge de ces tests techniques et technologiques, des études sociales et sociétales sont menées pour connaître le niveau d’acceptabilité de la population à ces systèmes. »
En étroite concertation avec la Commission de Régulation de l’Énergie, GrDF a engagé un projet ambitieux de modernisation de son système de comptage. Il vise à garantir et améliorer la qualité de service, développer la maîtrise de la demande et optimiser le réseau de distribution de gaz naturel en France. En 2010 et 2011, un premier test a été organisé par GrDF : 18 500 compteurs communicants ont été installés dans cinq communes. Le 25 juillet 2013, le gouvernement a autorisé le distributeur à lancer le déploiement généralisé. « Gazpar permettra de relever la consommation à distance, deux fois par jour, explique Isabelle Drochon, pilote opérationnelle du projet. Les clients seront facturés systématiquement sur consommation réelle. Grâce aux informations mises à leur disposition quotidiennement sur notre site internet, ils pourront mieux suivre et maîtriser leur consommation de gaz. Les économies d’énergie attendues sont de l’ordre de 1,5% sur la consommation totale. » Toutes les informations enregistrées par le compteur seront transmises par radio à un concentrateur qui les relayera ensuite, via téléphonie mobile ou réseaux filaires, au système d’information national. « Le remplacement des 11 millions de compteurs existants s’échelonnera entre 2017 et 2022. Au-delà de l’amélioration du service pour les consommateurs, Gazpar contribuera à renforcer l’efficacité du réseau de distribution. » En effet, les données alimenteront bientôt de nouveaux outils de télé-surveillance et de télé-exploitation du réseau.
« iPERL est un compteur d’eau intelligent », déclare Michel Jacquet, directeur commercial chez Sensus France, spécialiste des solutions de comptage d’eau. En intégrant une technologie innovante, il répond aux enjeux d’optimisation de la gestion et de la préservation de cette ressource naturelle vitale. « La précision d’iPERL offre une vraie valeur à travers sa plage de mesure étendue, indépendamment de la qualité de l’eau, de la pression ou des variations de diamètres du réseau. » Le compteur iPERL permet un comptage des plus petits débits, facilite la détection des fuites d’eau et offre aux gestionnaires une relève plus rapide grâce à la technologie radio et aux options de communication intégrées. Fort de ces atouts, iPERL a récemment séduit une première collectivité française : le Syndicat des Eaux de Basse-Vigneulles et Faulquemont (SEBVF), en Lorraine. Dans le cadre du renouvellement de son parc, le SEBVF va installer 8 000 compteurs iPERL dans les quatre prochaines années. « Nous avons fait le pari de l’innovation », annonce Hervé Siat, directeur du SEBVF. Avant, nous relevions 400 compteurs par jour en marchant, le moindre mur ou obstacle gênait la relève. Avec le compteur iPERL, la relève ne sera plus une contrainte. Nous pourrons relever jusqu’à 2 000 compteurs par jour avec une voiture à 30 km/h. Quant aux clients, ils seront rapidement avertis en cas de fuites. Ils pourront aussi agir et éviteront la surconsommation. » Enfin, le compteur iPERL détectera les fraudes.
Équipés de technologiques informatiques et d’automates, les smart grids permettent de piloter et de communiquer avec toutes leurs infrastructures. En France, le déploiement du compteur nouvelle génération Linky dans chaque foyer est la première étape de la mise en place du réseau électrique du futur. Communiquant, ce compteur reçoit et envoie des données et des ordres sans l’intervention physique d’un technicien. D’ici 2021, 35 millions de compteurs Linky doivent être installés sur le territoire national. Ils seront reliés à un centre de supervision et entreront en interaction de manière permanente avec le réseau. Déjà, ErDF souhaite aller plus loin. Le distributeur d’électricité historique pilote 18 projets « Smart grid ». « L’introduction de nouvelles technologies sur le réseau va nous permettre notamment de relever le défi des énergies renouvelables et d’améliorer la gestion de l’énergie, se réjouit Xavier Montuelle, chef de projet SOGRID. SOGRID expérimente le pilotage et la supervision du réseau de distribution moyenne et basse tension en s’appuyant sur une chaîne de communication globale et innovante. SOGRID installe le numérique sur l'ensemble du réseau électrique de distribution permettant ainsi à tous les équipements placés dessus de communiquer directement via le réseau électrique. » Ce système sera développé selon le nouveau protocole de communication CPL (courant porteur en ligne). Le projet a été lancé à Toulouse en 2013. « Nous sommes une terre d’innovation, dit Bertrand Serp, vice-président de Toulouse Métropole en charge du numérique. L’expérimentation doit se dérouler pendant six mois en 2015. Nous espérons que les résultats seront positifs afin d’offrir aux Toulousains un nouveau service, de développer le bassin numérique et d’avancer dans notre réflexion sur la Smart City, la ville de demain. »
Charlotte Malbranque