La nouvelle réforme DT-DICT s’est accompagnée d’une multitude de nouveaux textes réglementaires afin de rappeler, compléter voire définir au mieux les rôles et responsabilités des différentes parties prenantes à la préparation et l’exécution des travaux à proximité des réseaux.
- Les responsables de projets
: les maîtres d’ouvrages publics ou privés commandant les travaux, les maîtres d’œuvre travaillant pour leur compte ;
- Les exécutants de travaux
: en temps qu’entreprises ou particuliers ;
- Les exploitants de réseaux
;
- Les collectivités locales
;
- Les prestataires d’aide à la déclaration
;
- Les prestataires de détection et de géo référencement et en cartographie
;
L’étude de l’histoire récente met en avant de nombreuses difficultés qui ont motivé la réforme :
- Une mauvaise préparation des projets, le plus souvent sans prise en compte des réseaux existants par les maîtres d’ouvrage (1 DR pour 10 DICT) ;
- Des réseaux globalement mal répertoriés et mal cartographiés ;
- Un recensement incomplet et souvent obsolète des exploitants auprès des 36.000 communes de France ;
- Un déséquilibre des responsabilités entre les acteurs, la pression étant essentiellement sur les entreprises de réseaux.
Le bon respect de cette réforme doit permettre de prévenir les dommages aux réseaux, encore très nombreux actuellement (plus de 100 000 par an en France en 2011). Pour cela une norme AFNOR d’application obligatoire
a vu le jour le 27 juin 2012 (NF S 70-003 partie 1). La notion d’obligation n’est pas anodine et implique par conséquent une sanction en cas de non-respect.
Le MEDDE (Ministère de l’Ecologie du Développement Durable et de l’Energie) a créé 14 nouvelles sanctions
, sous forme d’amendes administratives, réprimant les infractions aux dispositions prévues par le décret n°2011-1241 du 5 octobre 2011
.
En complément les sanctions pénales prévues par la LOI n° 2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie demeurent :
« Le fait de procéder à des travaux à proximité d'un ouvrage de transport ou de distribution de gaz régulièrement identifié dans les cartes mentionnées à l'article 22-1 sans avoir adressé au préalable à l'exploitant de l'ouvrage concerné le dossier de déclaration d'intention de commencement de travaux constitue un délit au sens de l'article 121-3 du code pénal et est puni d'une amende de 25 000 EUR.
»
« L'auteur d'une atteinte à un ouvrage de transport ou de distribution de gaz de nature à mettre en danger la sécurité des personnes et des installations ou la protection de l'environnement a l'obligation de la déclarer à l'exploitant de l'ouvrage. Le fait d'omettre cette déclaration est puni d'une peine de six mois d'emprisonnement et d'une amende de 80 000 EUR. En cas de récidive, ces peines sont portées au double.
»
Les amendes administratives peuvent atteindre 1 500€ et sont susceptibles d’être doublées en cas de récidive.
Motifs d’amendes :
Pour les maîtres d’ouvrage :
- Absence d’envoi de la DT à tout ou partie des exploitants potentiellement concernés par le projet ;
- Commande des travaux sans remise à l’entreprise concernée des DT, récépissés de DT et plans de réseaux associés, sans réalisation préalable des investigations complémentaires ;
- Utilisation de la procédure simplifiée DT-DICT conjointe sans que les travaux correspondant n’entrent dans les cas d’application
- Commande de travaux dans le cadre de la procédure d’urgence sans que ces travaux puissent recevoir cette qualification ;
- Non réalisation du marquage/piquetage ;
Pour les exploitants de réseaux :
- Non enregistrement (ou enregistrement hors délai) sur le Guichet unique des coordonnées, références et zones d’implantations ;
- Non réponse (ou réponse hors délai) à une déclaration (DT ou DICT) ;
- Réponse à une déclaration avec des informations insuffisantes (récépissés incomplet, absence de précision sur la classe des plans…)
- Non prise en compte des résultats des investigations complémentaires dans le référentiel cartographique de l’exploitant (NB : pour cette disposition, les exploitants bénéficie d’un sursis jusqu’au 1er juillet 2013) ;
- Non réalisation du marquage/piquetage en l’absence de fourniture de plans ;
- Non-respect des distances minimales entre réseaux suite à la création ou la modification d’un ouvrage ;
Pour les entreprises de travaux :
- Absence d’envoi de la DICT à tout ou partie des exploitants potentiellement concernés par les travaux ;
- Engagement des travaux en l’absence de réponse de tout ou partie des exploitants de réseaux sensibles ;
- Obstruction pour accéder aux organes de sécurité ;
- Utilisation de la procédure simplifiée DT-DICT conjointe sans que les travaux correspondant n’entrent dans les cas d’application ;
- Réalisation dans le cadre de la procédure d’urgence sans que ces travaux puissent recevoir cette qualification ;
- Absence des DICT, récépissés de DICT et consignes sur le chantier
- Engagement ou poursuite des travaux en contradiction avec un ordre écrit établi suite à la découverte d’un réseau non répertorié ;
- Non-respect des méthodes et prescriptions techniques définies lors du projet ;
Pour les prestataires :
- Le prestataire fournit des prestations d’appui à la réalisation des déclarations sans être titulaire d’une convention en cours de validité avec le Guichet unique ou sans respecter les termes de cette convention (6 mois d’emprisonnement et 75 000€ d’amende) ;
- Fournir des relevés de mesure pour les investigations complémentaires ou pour les relevés topographiques sans être prestataire certifié ou sans avoir eu recours à un prestataire certifié (NB : 2017, date de la mise en place d’une certification).
Le code de l’environnement désigne les personnes susceptibles de faire appliquer ces sanctions.
Art. L.554-4
:
« Sont qualifiés pour procéder, dans l’exercice de leurs fonctions, à la recherche et à la constatation des infractions […], outre les officiers de police judiciaire et les agents de police judiciaire, les agents dûment commissionnés et assermentés des services décentralisés de l’Etat qui sont chargés de la surveillance de la sécurité des réseaux mentionnés au I de l’article L.554-1. Les infractions pénales prévues par le présent chapitre sont constatées par des procès-verbaux qui sont adressés, sous peine de nullité, dans les cinq jours qui suivent leur clôture, au procureur de la République. Ces procès-verbaux font foi jusqu’à preuve contraire.
»
Les services décentralisés de l’État dont il est question sont les DREAL (Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement) qui sont au nombre de 21 + la DRIEE (Direction Régionale et interdépartementale de l’Environnement et de l’Energie) pour l’Ile de France.
Ces organismes déconcentrés du Ministère sont en charge de l’environnement et mettent en œuvre, sous l’autorité du Préfet de la Région, les priorités d’actions de l’État en matière d’Environnement, de Logement de la Ville ou de l’Énergie et plus particulièrement celles issues du Grenelle de l’Environnement. La réduction des risques (industriels, naturels ou technologiques) est une de leurs priorités et par conséquent, elles jouent un rôle important dans la nouvelle réglementation DT-DICT. Ainsi, elles doivent assister les autorités administratives dans leur rôle d’autorité environnementale sur les plans, programmes et projets.
Depuis le 1er juillet 2012, il s’agissait essentiellement d’accompagner la mesure mais à compter de janvier 2013, les DREAL commenceront à appliquer les sanctions systématiquement en cas d’infractions.
Les visites de chantiers sont de deux ordres :
- Des visites inopinées ;
- Des visites réactives suites à des dommages d’ouvrages remontés par l’exploitant concerné.
L’amélioration de la sécurité étant la pierre angulaire de la réforme, c’est bien évidemment les situations mettant en jeu la sécurité qui seront les principales cibles des agents assermentés. L’indulgence sera de rigueur selon les circonstances.
Surveiller la bonne application de la réglementation n’est pas quelque chose de nouveau, mais elle impacte maintenant de façon équilibrée les différents acteurs. « Cette mise en place n’est pas compliquée mais différente
» indique un des responsables de l’activité à la DREAL Auvergne.
Si les visites sur chantier faisaient déjà partie de leurs missions, leur rôle va évoluer afin de remonter plus souvent vers les responsables de projet et ainsi obtenir la copie des marchés de travaux. « Le rééquilibrage des responsabilités passe par les clauses techniques et financières et il est important de les vérifier
».
« Concernant les exploitants de réseaux, nous sommes essentiellement en charge de la surveillance des réseaux de transport et distribution de gaz. Pour les réseaux électriques, il est possible que ça évolue par la suite. Nous attendons encore des directives de la part du ministère
».
S’il reste encore des ajustements à faire sur l’organisation qui sera véritablement mise en place, il faut savoir que les visites inopinées ont déjà commencées depuis le mois de juillet.
« Sur les deux derniers mois, une dizaine de visites inopinées sur chantiers et à chaque fois, 2 ou 3 éléments qui n’allaient pas. Potentiellement, 30 Procès-verbaux… ! Le procureur de la république risque d’être vite surchargé.
»
Si l’on considère les quelque 10 millions de chantiers par an justifiant l’envoi de DT et DICT ainsi que le faible nombre de DR établies sous l’ancien décret, il est probable que les DREAL aient encore beaucoup de « prévention » à faire pendant les prochains mois. Et ce, même si une nette amélioration dans le rapport DT/DICT est à souligner.
Antoine Baron